dc.description.abstract | «ΗΡΩΕΣ ΑΓΝΟΙ» SUR UN CRATERE ATTIQUE
(Planches 1-11, Fig. 1-2)Une ancienne acquisition du Musee National, un grand cratere a figures rouges
du IVe siecle, fragmentaire, mais conservant toute la partie inferieure de la decoration,
est reste jusqu’ a present inapper^ue. La cause en est que la representation,
unique jusqu’ a present, est restee inexpliqu£e. La peinture a deja et6 attribuee
au peintre d’ Oinomaos par Sir John Beazley (ARV21440).
Au centre est un autel, conserve en partie, pres duquel, a gauche, est assis un
jeune homme tenant un chevreau. II est couronne et tourne la tete vers une femme
debout pres de lui qui tient dans sa main une couronne de laurier.
Le jeune homme situe derriere elle parait un personnage plus important. De la
main gauche il tient une grande branche de laurier et s’apprete a recevoir de Γ
autre main le rameau que lui tend une femme qui lui fait face. La demi-lune representee
entre les rameaux de la branche tenue par le second jeune homme assure
Γidentification de l’autre objet semblable au-dessus de la tete du premier
jeune homme, comme une seconde demi-lune. Une cinquieme figure, la femme assise
au-dessus de l’autel, forme l’axe de la scene.
La liaison avec le centre et les personnes qui sont a droite est realisee par le
jeune homme qui fait un geste en direction d’un autre jeune homme devant
lui, qui tient une loutrophore, plutot lourde; il vient d’entrer dans la scene. La
jeune femme situee entre ces deux jeunes gens tenait, comme les autres, dans la
main levee une couronne qu’elle s’apprete a poser sur la tete de celui de gauche.
C’est un homme ainsi que le dernier personnage a droite, qui est, lui, assis et demi-nu.
On ne peut expliquer que comme le pied d’un lecythe 1’objet qu’on distingue
devant sa main droite. En haut et a gauche le bas du corps de trois femmes est
tout ce qui reste de la zone superieure.
On n’oserait pas expliquer la scene sans l’aide que fournit surtout le jeune homme
qui tient la loutrophore. Il doit etre un ϋωρος, qui a quitte prematurement ce monde.
Il est re$u dans un jardin oil de jeunes femmes couronnent les heros, oil on
fait des sacrifices sur l’autel.
Mais qui est l’autre heros qui tient la branche de laurier? Est-ce Apollon ou
Rhadamanthe? On pense a ce dernier par ce que la scene ne peut representer
que les lies des Bienheureux, les Champs Elysees (Pindare, Olymp. II et s. Frg.
129, 130).
Des l’ancienne tradition ils sont identifies avec le pays des Hyperboreens, ce qui
justifierait l’identification de ce dernier personnage comme Apollon et non comme Rhadamanthe, qui est d’ailleurs une figure assez nebuleuse. Les figures feminines
seraient done les Muses, reliees souvent a l’idee de l’immortalite.
Quand aux deux demi-lunes, l’hypothese la plus vraisemblable est celle que m’a
communiquee Sir John Beazley: elles doivent signifier ενη τε καί νέα, la derniere
et la nouvelle du mois. On pourrait done les placer a la fin du monde, ou se rencontrent
la nuit et le jour.
Un parallele pour la presence des Muses pres des heros est offert par un relief
du Musee National qu’on daterait vers 200 apres J.C. Comme il n’a pas ete trouve
pres de l’ancienne Academie 1’explication donnee par Svoronos, selon laquelle
le personnage accompagne par Heracles et les Muses doit etre le divin Platon,
n’est pas probable.
L’essentiel est que le defunt est couche dans une grande kline, dans un jai'din,
qui evoque les Champs-Elysees. Conze avait deja propose cette explication.
La scene, qui rappelle la peinture d’un cratere attique a figures rouges au Musee
de Naples oblige a expliquer cette derniere non comme un festin athenien ordinaire,
mais comme une ευωχία eternelle des Bienheureux.
Quand aux couronnes tenues par les femmes sur notre cratere on les rencontre
sur une scene expliquee deja comme se deroulant dans ces lieux par Neutsch (Rom.
Mitt. 60/61 (1953 -4), 62 et s.). Les Italiotes avaient une predilection pour de
telles scenes; les Atheniens les representaient plus rarement et avec un tact qui
les rend meconnaissables.
La date de notre cratere est appuyee surtout par le style des figures. Minces,
aux vetements transparents, aux contours courbes elles rappellent l’Athena du relief-
decret entre Athenes et Corfou, date en 379; elles font aussi penser au dessin
de l’amphore Panathenaique signie par Kittos et datee de la meme epoque.
La forme du cratere, encore assez solide, nous oriente vers 1’epoque precedant
le style de Kertsch; des examples plus tardifs de crateres en calice montrent une
evolution vers une forme qui monte vers le haut, le corps presque uni par une
courbe legere avec la zone des palmettes.
Dans le cas de quelques crateres en calice de la seconde moitie du siecle on
supposerait que les crateres en cloche ont servi de modele; le corps ne forme qu’un
avec la zone decorative d’en bas; la melodie des courbes aussi est la meme. | fr |